Le corps en émoi - COLLECTIF
Le corps en émoi - COLLECTIF
Rompant avec la conception traditionnelle du corps comme pure et simple res extensa en interaction avec une âme seule à même de sentir et de vouloir, la phénoménologie (E. Husserl, M. Merleau-Ponty, J. Patočka, M. Henry, R. Barbaras, …) en déploie une approche vécue, faisant de la chair (Leib, en allemand) le site même de notre rapport sensible et pratique aux étants.
Une telle perspective court cependant le risque de ne voir en l’incarnation qu’une condition de possibilité de la manifestation du monde – et donc de passer sous silence la phénoménalité de cette chair vivante elle-même. C’est dans ce contexte qu’une phénoménologie du corps en émoi s’avère indispensable : au contraire du corps percevant et du corps agissant, simples mediums transparents d’une conscience tout entière auprès des choses, le corps ému, en vertu des bouleversements mêmes qui le caractérisent (larmes, rougissements, sudation, …), recouvre une prégnance certaine, et s’impose comme instance propre. En bref : seule l’émotion est somatophanie, c’est-à-dire manifestation du corps en tant que corps.
Le présent volume se donne pour dessein d’étudier les différents versants de cette manifestation. La première partie, comprenant les contributions de Thomas Fuchs, Natalie Depraz, et Gabriel Mahéo, développe une réinterprétation incarnée des émotions intersubjectives – et en particulier de leur dimension politique. Au cours de la seconde partie, Charles Bobant, Grégori Jean, et Gilles A. Tiberghien s’interrogent sur la fonction du corps ému au sein des multiples pratiques artistiques et de leurs réceptions esthétiques. Enfin, la troisième partie, composée des travaux d’Alexis Delamare, d’Aurélien Deudon, et de Daniel Vespermann, propose une série d’explorations phénoménologiques particulières – étude de la joie et de la tristesse, de la jouissance amoureuse, et des affects atmosphériques.